dimanche 9 décembre 2012

A Trinité, une usine électrique en pleine reconversion

La façade rue de la Tour des dames (octobre 2012)
14-18 rue de la Tour des dames
Métro : Trinité - d'Estienne d'Orves 

Que faire des "sous-stations", ces petites usines électriques qui ont fleuri dans Paris entre 1900 et la seconde guerre mondiale, et que les changements techniques ont rendues inutiles?

La capitale a compté 36 sous-stations. Plus d’une quinzaine d'entre elles ont déjà été détruites (Saint-Antoine, Pasquier, Père-Lachaise, Louvre, Pantin, Neuilly, etc.). Mais aujourd’hui, l’intérêt nouveau accordé au patrimoine industriel interdit de les raser. Quelques unes sont d’ailleurs protégées au titre des monuments historiques ou de la ville de Paris.

De nombreuses solutions ont été expérimentées pour réutiliser ces bâtiments souvent immenses et hauts de plafond. La sous-station Laborde a été reconvertie en logements. Opéra accueille des bureaux de la RATP, et Cité, divers équipements électriques. Sèvres est devenue un espace d’exposition pour EDF, Saint-Roch une crèche municipale, Plaisance un "hôtel d’activités". Gobelins vient d’être transformée en centre d’hébergement d’urgence.

La sous-station Trinité offre un bon exemple des questions qui peuvent se poser. 


L'ex-sous-station Trinité et l'immeuble voisin,
d'un style tout à fait autre (octobre 2012)
Elle a été construite en deux étapes, en 1924 et 1927, rue de la Tour des Dames, dans le quartier dit de la Nouvelle Athènes, sur le modèle mis au point par l’architecte Paul Friesé.  
L’emplacement avait auparavant été occupé par un fabricant de machines à calculer (l’"arithmomètre", "machine très pratique pour faire, avec certitude et incroyable rapidité, toutes les opérations d'arithmétique") et avant encore, en 1866-67, par l’imprimerie du fameux affichiste Jules Chéret

Durant son utilisation par la Compagnie parisienne de distribution d’électricité, "le rez-de-chaussée était un vaste hall des machines, et les étages étaient occupés par les accumulateurs qui abritaient les compagnons occupés à la surveillance du matériel électrique ou au changement de pièces des commutatrices rotatives qui reposaient sur un socle, raconte un ancien agent. Tout cet ensemble créait cette impeccable symphonie." (1).

Tout l'enjeu est de conserver cette impression d’harmonie après l’arrêt définitif des machines, au début des années 1990.  
La première solution n’est guère satisfaisante. La sous-station est d’abord utilisée par EDF et la mairie de Paris comme lieu de promotion des deux-roues électriques. Des cloisons et des faux-plafonds sont ajoutés, cassant l’effet de monumentalité de la salle des machines. "Le réaménagement opéré pour cette réaffectation a dénaturé les lieux, juge Tewfik Tabouche, qui a écrit un mémoire sur le sujet dans le cadre de ses études d’architecture. C’est l’exemple à ne pas suivre."

De 2006 à 2009, la sous-station vide accueille ensuite les artistes du 59, rue de Rivoli provisoirement délogés de leur squat.

Quelle nouvelle vocation donner au bâtiment, au sommet duquel on peut lire l’inscription "COMPAGNIE PARISIENNE DE DIS­TRIBUTION D’ELECTRICITE" creusée dans le mur ? Compte-tenu du manque d’ensoleillement (seules les verrières de la façade sur rue apportent de la lumière naturelle), ainsi que de l’existence de planchers particulièrement solides, Tewfik Tabouche suggère dans son mémoire de 2010 d’y loger une bibliothèque.

C’est une autre option qui est retenue. Il est finalement décidé d’attribuer à ce lieu deux rôles en un. Le premier n’est pas très éloigné de sa vocation d’origine : le sous-sol et la moitié du dernier étage doivent être utilisés par la société Climespace pour implanter une centrale de production frigorifique. Celle-ci alimentera les grands magasins, les hôtels et les bureaux du sud de l’arrondissement.
L’ancienne sous-station deviendra simultanément un centre d’animation et centre sportif. ll devrait notamment comprendre un dojo, une salle de danse, des vestiaires, un mur d’escalade, une salle d’arts plastiques, un studio d’enregistrement, et une grande salle de spectacle. 

Les travaux ont commencé. Livraison prévue fin 2013, si tout va bien.


1.- Citation extraite du mémoire de Tewfik Tabouche, École Nationale Supérieure d’Architecture Paris Val de Seine, 2010.

En haut de la façade, le nom de la compagnie d'électricité, la CPDE,
à l'origine de la sous-station (octobre 2012)
Plan de la façade (1924)

2 commentaires:

  1. Un projet aussi naze, et qui seras de toute les manières mal réalisé, ne pourras que gâcher cet espace extraordinaire. RIP

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  2. Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.

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